JEANNE ADDED

En partenariat avec RTL2 et ST Groupe,

Le vent a tourné, la fumée s’est envolée, le feu brûle. Sur la pochette de son deuxième album « Radiate », 2018, Jeanne Added regarde dans la même direction que sur celle de son premier album « Be Sensational », 2015, et pourtant tout semble s’inverser. L’apparition gris métallisée qui sortait des ténèbres fait place à une image blanche déconcertante de sincérité et de force mêlées de tendresse. Cette invitation à la caresse est bien plus qu’un habile clin d’œil esthétique, elle illustre à merveille l’esprit de cet album. Si la route continue vers le même but, la même exigence musicale, quelques fardeaux ont été déposés. Les tensions magnifiées par des sons froids qui ont fait le succès de son premier album de combattante semblent avoir explosées au cours de ses 200 concerts partout en France pendant plus de deux ans. Du feu, il reste la flamme incandescente de la musicienne qui brûle d’une intensité rare. Dans ce nouvel album « Radiate », au titre évocateur s’il en est, Jeanne Added rayonne, elle chante avec une ferveur enivrante d’émotions. Vraie, proche, détendue, elle chante à visage découvert. « Radiate », album lumineux, avance des premiers mots « let it go , let it hope … we will be somebody new » aux derniers « loneliness overcome » vers la révélation à soi-même dans l’échange avec l’autre, entre deux temps, la vie est vibration, comme le chant. D’ailleurs, pour son second opus, Jeanne Added explique : « j’avais envie de plus de voix, c’est à dire d’entendre ma voix telle que je la connais, de la faire entendre dans un spectre plus large» . Naturellement, elle fait écouter ses maquettes à ses amis Fréderic Soulard, qu’elle connait depuis le Conservatoire National Supérieur de Paris et Mark Kerr qui forment ensemble Maestro et signent la production de l’album. « Deux immenses musiciens, précise-t-elle, Fred est chez lui dans n’importe quelle machine, n’importe quel synthétiseur (il fait également partie du groupe Limousine) et Mark (ancien batteur des Rita Mitsouko) est un grand programmateur de boite à rythme, et un batteur imparable. De plus ils sont absolument irrésistibles en live, maestro c'est tendu, excitant, physique». Physique le mot est donné et la production est une merveille. Nourrie d’influences multiples, des paysages sonores rétro futuristes aux contours fiévreux, la production, avec inventivité et finesse, brouille les frontières des styles pour laisser la place au chant clair et précis. « Eviter la démonstration, chercher, empiler, pour ensuite tamiser et arriver à une forme de pureté du geste qui correspond vraiment à l’idée que nous nous faisons de la musique de Jeanne» voici les mots de Maestro pour expliquer leur travail sur l’album avant de poursuivre « elle a une manière unique de concentrer son énergie, il y a une densité et une direction dans chaque phrase qu’elle chante. Il nous restait à rentrer dans ce son, cette démarche et son exigence ». Magistrale la voix de Jeanne Added est irrésistible. Elle irradie, ensorcèle, désarme, trouble. Elle rend addict, amoureux.se, heureux.se, vivant.e. Et s’il fallait encore le démontrer, commencez donc cet album en écoutant « song 1-2 ». Les dieux sont furieux, épidermique et volcanique, la voix de Jeanne Added soulève des montagnes, nos montagnes. Les grandes et les petites.


LEONIE PERNET - Première partie

Comme une plongée dans un liquide amniotique, le premier album de Léonie Pernet, 28 ans, donne le vertige des nuits sans fin. Ces nuits passées à boxer contre soimême, sans savoir s’il y aura un matin. Crave : ce disque serait celui d’un désir oppressant, griffé d’ombres et d’éclats, un désir inquiet qu’il aura fallu trois ans à Léonie depuis Two of us, son premier EP (Kill the DJ Records) remarqué en 2014, pour l’éprouver, le composer et, enfin, le partager. Disque de l’intranquilité, cet album fut composé dans une solitude totale, parfois toxique, que seul Alf (Stéphane Briat) vint sublimer au mixage. C’est que Léonie, qui fit ses armes auprès de Yuksek en tant que batteuse, ne soutient pas le compromis et prend toutes les décisions seule : chacun des 11 titres de ce disque fut composé dans l’évidence foetale, et arrangé dans un studio de Barbès qui aurait pu être renommé l’intime conviction. Un disque de la solitude donc — mais d’une solitude peuplée. Unique, Léonie n’en est pas moins foule. Foule de talents, d’abord. Batteuse, pianiste, arrangeuse, chanteuse à la tessiture en grand écart, Léonie est un kaléidoscope. Foule d’influences, aussi. Et si dans African Melancholia on devine les animaux mécaniques de Marilyn Manson, dans Crave c’est le spectre baroque de Klaus Nomi qui apparait. Ailleurs ce sont les voix aériennes de Mansfield Tya, le souvenir de Jeanne Moreau, de Rachmaninov ou même de Philip Glass dans le très minéral Caribou. Un poème de François de Malherbe donne à Rose ses paroles quand, non loin, la sublime Hanaa psalmodie en arabe l’inquiétude d’être. Crave est un disque de collisions. Il faut l’imaginer comme une traversée en eaux bleues, parcourue de créatures hybrides et légendaires. Des amphibies métissés, comme l’est la vie de Léonie. Une trajectoire faite de dépendances et d’affranchissements successifs. Après une scolarité houleuse et un bac passé en candidate déjà très libre, Léonie étudie les arts sacrés et la musique liturgique à la fac, tout en organisant ses premières soirées en club (les Corps VS Machines, chez Moune), conjuguées à une conscience politique active (entre 2013 et 2016, elle propose sur internet les poétiques et engagés Mix pour tous, Mix debout et Mix d’entre deux tours). Un quotidien composé d’électro griffant, de colères ciblées et de puits de lumière mystiques, donc, semblable au disque dont il accouche aujourd’hui. Et puis, et surtout peut-être, il y a l’horizon. Car la musique de Léonie Pernet, réverbérée et cinématographique (elle signe la BO de Bébé Tigre de Cyprien Vial en 2015, et deux titres dans Marvin d’Anne Fontaine en 2017) est aussi spacieuse qu’un lieu de culte. Sa voix soufflée, un appel d’air. Ses fins de morceaux, des portes dérobées. Toute confinée qu’elle est quand elle compose, Léonie Pernet à le goût des sorties qui ouvrent, des outro qui l’emportent ailleurs. Et achevant l’écoute de ce disque comme on sort d’une insomnie fiévreuse, peut-être sentirez-vous le vent d’un matin plus doux, léger comme une chanson, toi qui ne veux rien dire, toi qui me parles d’elle, de ses nuits, de nos nuits…

Programmation Festival de Lunel


Tarif réduit applicable aux personnes jusqu'à 18 ans, demandeurs d'emplois, personnes en situation de précarité, personnes en situation de réinsertion professionnelle.